Notre virée en
Charlevoix
du 4 au 11 janvier 2014
Après les partys
des Fêtes dans les familles, David et moi, on est parti redécouvrir un coin de
pays nordique que l’on savoure à chaque fois qu’on s’y retrouve, environ aux
cinq ans, avec le goût d’aller prendre du grand air dans les montagnes accidentées
au bord de notre beau fleuve Saint-Laurent, majestueux dans cette étreinte
rocheuse pittoresque qu’est la région
de Charlevoix...peuplée de personnages lutinesques.
Cette fois-ci, début janvier 2014, on a connu « de tous
les temps » en peu de temps : pluie, éclairs et tonnerre, verglas,
neige mouillante, grésil, neige floconneuse, grand vent, grand froid, gros
soleil, puis encore gros nuages, brume épaisse, pluie, verglas, etc.
En sept jours, on a réussi à faire deux fois de la
randonnée à raquettes… sur neige croûtée : une fois sous les nuages bas
et gris, une fois en plein soleil sous un ciel bleu glacial. La beauté des
lieux fait presque oublier les mains gelées par le laçage des raquettes dans le
froid vif, qu’il soit sous les nuages bas ou sous le plein soleil.
Des paysages majestueux, y en a beaucoup en Charlevoix!
Le long du fleuve, entre Québec et
Tadoussac, une série de caps : la Côte-de-Beaupré, Cap-Brûlé, Cap Rouge,
Cap-aux-Corbeaux, Les Éboulements,
Cap-aux-Oies, Pointe-au-Pic, Cap-à-l’Aigle,
Caps-Saint-Fidèle, Pointe des Rochers, Pointe à Xavier,
Pointe aux Quilles, Cap de la Tête au Chien, Cap du Nid au Corbeau, Cap du
Basque, Pointe au Bouleau, Pointe aux Alouettes, Pointe Noire, Pointe de
l’Islet, Pointe aux Vaches.
Les montagnes, certaines arrondies par les glaciers,
d’autres abruptes comme coupées au couteau avec des arêtes non invitantes. Des
canyons serrés entre les falaises de roches, comme à Baie-des-Rochers où nous
étions l’après-midi du 7 janvier.
L’Isle-aux-Coudres, offerte aux grands vents et aux marées, on
l’a découverte pour la première fois dans ses habits d’hiver, pendant la traversée
à partir de Saint-Joseph-de-la-Rive et sur l’île-même.
Dans le grand froid de janvier, le traversier laisse sa large trace dans les glaces brisées, concassées par l'épaisse plateforme d'acier. L'abondance de glaces dans le courant exige du capitaine beaucoup de manoeuvres pour accoster au quai et permettre d'amarrer le bateau. La vidéo ci-dessous donne l'impression d'y être (cliquer sur le lien).
Traversée de l'Isle-aux-Coudres
Sur l'île, nous étions à la recherche d’un livre sur les expériences de cabotage du capitaine Éloi Perron, natif de l’île et habitant encore son lieu à
l’âge respectable de 91 ans.
Ce livre, on devait pouvoir le trouver au motel adjacent
au musée Les Voitures d’Eau, musée
fermé l’hiver, mais appartenant à la famille du capitaine Perron. C’est sa petite-fille , responsable sur place, qui nous a vendu son livre Les mémoires du Capitaine Éloi, brique
de 536 pages.
Livre-récit
que nous dégustons à voix haute, parfois à gorge déployée à cause des images
évoquées par le capitaine, chapitre par chapitre, au fil de nos périodes
libres, pour le plaisir du langage oral dont est formé ce récit. Beaucoup de
répétitions dans les faits vécus et les expressions relevant de la morale, mais
c’est un vécu raconté qui a son pesant d’or. C’est une source d’information intarissable.
Le capitaine y raconte sa vie obligée de marin à bord des
goélettes sur le fleuve pour survivre, lui et sa famille, en transportant du
bois, des patates, du sucre et de la farine principalement à Québec pour nourrir
les gens, à l’époque où les transports terrestres n’étaient pas encore
développés, ni les instruments de navigation (radars et GPS).
La navigation se faisait à la boussole (compas, sur un
bateau) et à la sonde (pour s’assurer de la profondeur d’eau) dans ces passages
fluviaux difficiles autour de l’Isle-aux-Coudres et dans cette section du
fleuve aux courants dangereux entre Montréal et Gaspé, mais plus
particulièrement entre Québec et Tadoussac. La rencontre de la rivière Saguenay
et du fleuve Saint-Laurent crée de
forts courants qui se croisent en clapotis et donnent bien de la misère aux
navigateurs.
Avec les variations brusques de la température de l’air, la
brume de mer s’élevant au-dessus des glaces flottantes crée une atmosphère
mystérieuse sur le fleuve.
De l’intérieur du chalet juché sur la colline en bordure du
fleuve, nous avons une vue magnifique sur le ciel, sur le fleuve et sur la côte
de La Malbaie. Nous observons le spectacle vivant du ciel aux couleurs
constamment changeantes selon les conditions météorologiques variées de cette
première semaine de janvier.
Comme cadeau de la nouvelle année, des aurores boréales
surviennent le soir du jeudi 9
janvier. De grandes effilochures blanchâtres et glaciales venant du Nord, comme
glissant dans le firmament, s’étirent en longueur vers le Sud, en mouvement
constant, s’amincissant ou s’épaississant au gré des courants d’air. Un spectacle!
Après celui des étoiles!
Les cargos et autres gros bateaux descendent ou remontent le
fleuve avec leur charge de grains ou de pétrole, en s’arrêtant presque tous à
Pointe-au-Pic, sur la pointe de la baie de La Malbaie,
en attente du courant
favorable, montant ou descendant. David suit le traffic maritime à l’aide de
son portable; nous savons d’où viennent les bateaux identifiés et quelle est
leur destination.
Peu d’oiseaux sont observés en cette période de
l’année : quelques canards (sarcelles et garrots) et quelques goélands dans la baie de La
Malbaie; un voilier tourbillonnant de goglus à l’Isle-aux-Coudres; des
étourneaux, un jour de redoux à Cap-à-l’Aigle où se trouve le chalet qu’on a
loué au Domaine Frais Air.
Vu très peu d’animaux sauvages :
un renard à la
chasse sur une colline élevée,
neigeuse et cristalline dans le soleil brillant, près de la piste Étang Malbaie,
à hauteur du refuge La Galette,
dans le parc des Grands Jardins, où nous étions à raquettes;
un chevreuil s’éloignant
en sauts brusques dans une neige
croûtée d’un champ en terrain agricole le long de la route principale, la
138, près de la jonction pour
Saint-Urbain.
Pas eu la chance, cette année, de voir des caribous, comme on en avait vu la dernière fois :
une horde sortant de la forêt et se dirigeant sur la route pavée pour avancer plus
aisément…
Des livres empruntés à l’Accueil du Domaine Frais Air nous ont
fait découvrir encore d’autres morceaux d’histoire de Charlevoix : en informations
géologique, botanique et maritime de cette région particulière formée à la
suite de l’écrasement d’une immense météorite il y a 350 millions d’années qui
a causé la fracture du sol, l’affaissement créant le fleuve Saint-Laurent et la
repoussée du fond-cratère du fleuve créant la chaîne des Appalaches plus au Sud
le long de la rive.
Nous avons apprécié les récits authentiques de gens
marquants de l’histoire de la région, comme le capitaine Perron, mais aussi du guide de montagne Thomas
Fortin qui présente, dans le livre Les
Grands Jardins; haut lieu de Charlevoix, des photos de l’évolution du parc
des Grands Jardins et de la manière de vivre de la pêche et de la chasse au
début du siècle dernier.
On a admiré aussi des livres de peintres de Charlevoix immortalisant par leurs tableaux des
scènes typiques de la région : maisons à mansardes, ces corniches dans la
toiture; paysages de montagnes et de mer selon la palette des saisons; granges
en bois non peint; champs de blé et moutons broutant; animaux de ferme en
liberté; croix de chemin; bateaux sur le fleuve ou à l’échouage; moulins à
farine ou à bois… Plusieurs artistes ouvrent leur atelier au public; la grosse
période pour ce genre de découvertes est plutôt l’été et l’automne.
En plus de toutes ces merveilles à dévorer des yeux, nous
avons pris plaisir aussi, grâce au magazine La
route des saveurs de Charlevoix, à se procurer et à savourer des
spécialités de la région : fromages de brebis ou de vache; pains au levain faits de farine cultivée localement, moulue
sur pierre localement et cuits chez les boulangers locaux; coupes d’agneau, pâtés et terrines confectionnés à partir de
viandes biologiques locales; bières de micro-brasserie; saumon et truite fumés de la Gaspésie; pâtisseries à
l’ancienne; confiture de bleuets locaux; miels produits localement; sucre
d’érable pur, local.
Bref, des plaisirs multipliés. Non seulement de découvrir
les produits locaux fut un plaisir, mais aussi de pouvoir échanger avec les
producteurs, fiers de faire connaître le fruit de leur labeur. Et, bien sûr,
nous en avons rapporté quelques spécimens pour notre hiver à Montréal.
La lecture du capitaine Perron m’a mis dans la tête une
façon de parler, de dire, qui a une certaine mélodie ou poésie. Pis avec les
chants du Jour de l’An encore dans l’inconscient, voilà ce que ça donne ben
franchement :
Ben ardimment
Mon vieux cheval blanc
On est revenu du pays tout blanc
Avec la glace par devant
On a passé un bon bout’d’temps
À marcher dans’glace pis dans l’vent
C’est pas mêlant
On avait envie de rester d’dans.
Excusez-la!
Flacatoune La Piroche
(Nom que m’a trouvé mon cher David)